Camille Mondon
Le vieux

Le vieux

Il fait un temps superbe en ce matin du 25 décembre à Bylakuppe dans l’état du Karnataka (Inde du sud). Il est 9 heures. Il tourne le dos au soleil, assis au milieu de la cour de la petite maison qu'il occupe avec sa femme dans le " Old Camp n° 5" depuis qu'il a quitté le Tibet en 1962. Il a d'abord vérifié son moulin à prières car il ne tourne pas très bien ce jour-là. Après plusieurs essais et une réparation sans doute nécessaire, il a considéré enfin qu’il était en bon état de fonctionnement pour sa prière du matin. Il s'est mouché longuement dans une pièce de tissu soigneusement pliée en quatre et gardée dans une poche de son gilet depuis longtemps. Puis il a sorti d'une autre poche, une étoffe jaune dans laquelle était une énorme paire de lunettes de soleil cerclée de blanc. Il l'a d'abord regardée, l'a nettoyée avec insistance et l'a mise sur son visage. Ceci fait, il a sorti d'une troisième poche, une tabatière minuscule, l’a ouverte et il a mis lentement une pincée de tabac dans sa narine gauche. Il a reniflé profondément. Il s'est alors saisi du moulin à prières qu'il avait posé sur le sol à côté de lui, puis s'est assuré d'une position assise très confortable, calant bien le tapis sous son fessier, les jambes repliées. Il a sorti son chapelet et de sa main gauche a commencé à égrener les perles de buis tandis que le moulin tournait déjà dans sa main droite. Je l'entends encore ronronner d'une voix grave et chantante sa prière matinale… A 10 heures, c'est elle qui est venue d'un pas mal assuré lié à son âge lui déposer sur le sol le thé au beurre et la tsampa. Une courte pause au milieu des "mantras". Une tradition dans tous les monastères tibétains, comme dans les cours villageoises des camps de réfugiés.

 

Le vieux

 

Photos de Camille Mondon (Janvier 2011)

  

OCTOBRE 2011