L'Ecole des femmes
Acte V


Scène 6 - ARNOLPHE, HORACE

HORACE
Ah! je viens vous trouver, accablé de douleur.
Le ciel, seigneur Arsolphe, a conclu mon malheur;
Et, par un trait fatal d'une injustice extrême,
On me veut arracher de la beauté que j'aime.
Pour arriver ici mon père a pris le frais;
J'ai trouvé qu'il mettait pied à terre ici près:
Et la cause, en un mot, d'une telle venue,
Qui, comme je disais, ne m'était pas connue,
C'est qu'il m'a marié sans m'en écrire rien,
Et qu'il vient en ces lieux célébrer ce lien.
Jugez, en prenant part à mon inquiétude,
S'il pouvait m'arriver un contre-temps plus rude.
Cet Enrique, dont hier je m'informais à vous,
Cause tout le malheur dont je ressens les coups:
Il vient avec mon père achever ma ruine,
Et c'est sa fille unique à qui l'on me destine.
J'ai, dès leurs premiers mots, pensé m'évanouir:
Et d'abord, sans vouloir plus longtemps les ouïr,
Mon père ayant parlé de vous rendre visite,
L'esprit plein de frayeur, je l'ai devancé vite.
De grâce, gardez-vous de lui rien découvrir
De mon engagement, qui le pourrait aigrir;
Et tâchez, comme en vous il prend grande créance,
De le dissuader de cette autre alliance.

ARNOLPHE
Oui-da.

HORACE
Conseillez-lui de différer un peu,
Et rendez, en ami, ce service à mon feu.

ARNOLPHE
Je n'y manquerai pas.

HORACE
C'est en vous que j'espère.

ARNOLPHE
Fort bien.

HORACE
Et je vous tiens mon véritable père.
Dites-lui que mon âge... Ah! je le vois venir!
Ecoutez les raisons que je vous puis fournir.

(Ils demeurent en un coin du théâtre.)



Acte V, Scène 7 / Introduction à l'Ecole des femmes
Le Malade imaginaire - Le Bourgeois gentilhomme (extrait)
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5 juin 1996
cnetter1@swarthmore.edu