souffles
numéro 2, deuxième trimestre 1966

abdelkébir khatibi: poèmes
p. 16



la rue

s'épanouit dans mon sang
élargit ses racines
ses tombeaux
sa mémoire aux limites du corps

L'invincible
l'irréductible la rue
toute révolte est avalanche de pierres
portes envolées dans la nuit tournante
avalanche de poussière ailée de lignes
géométries aiguës

Debout, dans la rue violente
l'homme, premier a la parole


devenir

Les arbres projettent leurs ombres frêles entremêlées
elles se prolongent comme un ennui d'enfant

La danse crépusculaire d'une feuille morte
construit la géométrie du temps
mon acte devient une hache dans la nuit

émeute

Il faut traverser la rue
Le corps suspendu
Ce point multicolore
Entre mon regard qui vibre
Et la ville ouverte à la mort.

Il faut traverser la rue
Le corps suspendu
Devant le mur poignardé par les cris
J'ai le dos qui meurt dans la rue
En une ligne droite.

Le trottoir galope intermittent
Il traverse mes yeux horizontalement
Puis se brise presque strident
Comme un miaulement définitif.



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souffles septembre 1997
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