souffles
numéro 5, premier trimestre 1967

poètes algériens
malek alloula : terres (fragments)
p. 31


1

D'énormes terres violettes
crépitant au sud de nos mirages
dérivent au son de la flûte
Morceaux de bravoure d'une musique nasillarde
que dérobe le détour d'une piste
où divaguent les chameliers tristes
Le dattier secoue sa crinière
sperme que le vent emporte
au hasard d'un rute éolien
Toute naissance est déchirure d'éclair
trident perdu dans des entrailles
Gémissent les dromadaires
porteurs de la double brûlure.


2

un aigle fusille son ombre
double de lui-même en ce pays de mirages
une planche cloue la parole du livre
Notre crucifixion
derrière les portes basses
là s'accroupit un lettré
La leçon entre ses pieds
pour obscurcir le regard
Le dessin de la natte
est celui de nos terres


3

Elan ce cri inachevé
nos terres baillent sur la mer
métal fondu leur palais
Tout crépite alentour
jusqu'aux gestes familiers
La crécelle du vent
dans les roseaux sauvages
Et les sourires forceraient l'obstacle
n'était cette longue crispation des dents
Un soleil là-bas
taraude les plaies impunément



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