Coucou la mousse
Samedi, plein de monde consomme de tout. Je prends, repose, reprends, laisse tomber des boîtes de mouchoirs en papier dans mon caddy, glisse vers la caisse. Le ticket s’enroule sur les doigts de la caissière, la carte Visa fait clac, thank you, have a good day, bye.
Dehors, je cherche des yeux la Coccinelle blanche. Facile, il lui manque deux enjoliveurs perdus dans les ornières des highways. Soleil éblouissant. Cachet d’aspirine VW, tu roules en boule entre les suppositoires Toyota, dépasses les Cadillac vieux rêve vieux rose avec au volant des messieurs anguleux, les motos et motards aussi larges que hauts et les camions aux cheminées d’aluminium. Pas d’erreur, lecteur, je suis aux States.
La fin de l’hiver approche, inodore. Sol grisâtre, arbustes désolants, monticules de neige noircie! Je préfère rêver aux coucous et primevères, bijoux des enfants, petits trésors de poésie.
Alors, alors, j’entends le fin ruisseau tourbillonner entre des accroche-coeur verts. Les coucous si coquins dressent leurs tiges rehaussées de minuscules fleurs jaune pâle. Ils échangent leur doux parfum d’amande comme des dames à la sortie des écoles vantent leurs progénitures. Les primevères en barboteuses barbotent dans la mousse baignée de soleil.
Mes sandales en tissu sont encore humides de la traversée de la rivière, je viens de m’agenouiller sur la mousse et caresse ses pentes, collines et bosses extravagantes. Ça chatouille, surtout qu’elle a aussi ses tiges, champignons ou fleurs microscopiques. Je vais voir de plus près mais lasse d’étudier, m’installe sur le côté, remonte les jambes, place mes bras autour des genoux, ferme les yeux, enfonce la joue dans la mousse, mes boucles amusent les fourmis. Je serai toute mouillée, ma robe blanche sera toute verte d’un côté, on dira: “Mais d’où viens-tu, mon petit berlingot?”
Questions
1- Où et quand commence la rêverie?
2- Quel est le sujet de la rêverie?
3- A quoi rêvez-vous, de jour? de nuit?
Photo de Sophie et texte de Clic (février 05)