ClicFle : La méthode Boscher (Anne-Marie Obajtek-Kirkwood)

Elle retrouva, pratiquement cinquante ans plus tard, imprimé en mars 2007, le livre d’apprentissage de la lecture de son cours préparatoire, La Méthode Boscher ou La Journée des Tout Petits, livre qui l’avait tant ravie petite, que sa mère avait dû en quérir la référence auprès de son institutrice afin qu’elle disposât d’un exemplaire à la maison.

Des pages surgit alors tout un passé joliment coloré de dessins naïfs et charmants des villes et des champs, des travaux et des jours, passé désuet, périmé où « le jeudi était le jour du jeu », où « julien fauche son foin », « rené cherche des nids », « toinon garde ses oies », « léon achète du bonbon », « le maréchal ferre le cheval », « le cheval tire la charrue ». Chacune de ces phrases était précédée en haut de page d’une scène qui l’illustrait.

Au tout début de la méthode, ce n’était que quelques mots : « le semeur », « la cabane du sabotier », « la soupe aux choux »… D’autres dessins coloraient les marges : stylographe, plumier, châtaignes, pivoine, broc, bûchettes et la page se terminait par l‘initiation au calcul tout en bas.

Dans son univers simple et modeste d’enfant sans télévision, possédant seulement un ou deux livres bien à elle, celui-ci constituait un trésor illimité de rêveries, tremplin d’où elle rejoignait ces petites filles « au bord de la grève », se voyait à bord d’un de ces avions qui « va vite ». Il était source aussi de découvertes d’autres univers, celui du vigneron, de la ferme et de voyages au pays de la fiction avec de jolis poèmes et histoires que sa mère lui lisait, extraits du Petit Poucet, de La Pêche d’Isengrin, La Chèvre de Monsieur Seguin et de cette courageuse petite poule rouge dont elle pouvait répéter le récit par cœur à force de l‘avoir entendu.

Et ces syllabes, ces mots imprimés en cursive au fil des pages lui en rappelaient d’autres qu’elle s’était tant appliquée à tracer, à copier, recopier des heures durant avec grande assiduité et patience, avec plaisir aussi, signes qui allaient lui ouvrir le monde et sa richesse infinie.