souffles
numéro 2, deuxième trimestre 1966

extraits de correspondance
pp. 3-4


Paris le 27 Avril 1966

Cher monsieur,

     je reçois le premier numéro de Souffles que vous avez eu la gentillesse de me faire envoyer.
     J'attendais cette revue, je l'espérais.
     Oui, il fallait que vous repreniez le relais et que vous alliez ailleurs que nous.
     Bonne chance; je suis de tout coeur avec vous.

albert memmi


Alger, 22 Mai 1966

Cher ami,

     dois-je vous dire que nous attendions ces "Souffles".
     "Souffles" d'une déflagration qui, je le souhaite et l'espère par dessus tout, sera signal de salut au-delà du crépuscule domestiqué et du radotage aimable.
     Avant tout, vous savoir gré de cette mèche allumée sous le sommeil. J'ai beaucoup apprécié le courage du prologue qui de plus a le mérite de poser les problèmes tels qu'ils doivent l'être c'est-à-dire privés d'un sentimentalisme rétrograde qui fleure, chez certains de nos littérateurs une débilité mentale vainement masquée par la démagogie.
     Quant aux textes, outre leur indéniable caractère poétique, ils me paraissent doublement intéressants. D'une part ils illustrent et expriment, chacun à sa manière, ce besoin vital de sortir des chemins battus jusqu'à la trame, d'une poésie qui a fait son temps. D'autre part, le ton de ces poèmes m'assure que la relève ne sera pas un vain mot et qu'elle se fera de plus contre une poussiéreuse culture qui s'exila nonchalamment ("le soleil africain" y étant certainement pour quelque chose) vers une sédimentation haillonneuse.
     Aussi, je vous prie de bien vouloir trouver dans cette lettre un sincère encouragement pour la tâche difficile qui est la vôtre car l'incompréhension et la bêtise sont grandes autour des poètes qui veulent enfin dire quelque chose. Il faut payer de sa personne. En poésie plus que partout ailleurs. Mais ce qui me rassure, c'est la foi incorruptible qui se dégage de tous les textes et les noms de KhairEddine, de Nissaboury, de Fatha, d'EI Houadri et le vôtre seront désormais pour moi signes d'une promesse dédaigneuse de toutes concessions hormis celles à la seule poésie.
     Sera-t-il nécessaire de préciser que vous pouvez compter sur mon entière et amicale collaboration.
     D'autre part, je serais heureux que le dialogue amorcé à la faveur de "Souffles" se poursuive, aussi bien avec vous qu'avec les collaborateurs de la revue, puisque nous voilà compagnons de route...

malek alloula


Honfleur, le 21 Mai 1966

Cher ami,

     j'ai été très heureux de recevoir votre lettre et le premier numéro de la revue "Souffles", dont j'ai pris contact avec beaucoup d'intérêt. Elle témoigne de la vitalité d'une poésie de combat au Maroc dont votre pays a certainement le plus grand besoin.

pierre jean oswald



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