souffles
numéro 2, deuxième trimestre 1966hamid el houadri: quasidat as safar
traduit de l'arabe par nissaboury
pp. 17-18
absurdes ces pygmées moi j'accuse la mer les oiseaux accusent
qui donc s'est faufilé dans la ville de cuivre
laissez-moi cracher
souffle dans les êtres solitude le mauvais sang de la foule m'arrive jusqu'aux clameurs du rêve
désespérée une meute m'avale dans le vide un nuage de
mains maigres sans dégoûtet les années s'accumulent
prolongent une maladie de non-mémoire
laissez-moi m'enfoncer dans la boue
il me faut un chemin
dans le désert des routesje me révolte contre les traditions
je suis déchiré de tous côtés
moi depuis quand suis-je de retour depuis quand la détresse fait-elle
jaillir des sources dans les nuits de lune au diable murailles étrangères
je suis votre énigme je ne sais que dire ni que faire et
avant que le soleil ne quitte nos mémoires égorgées
il
entonnait des versets du coran très-sage la nature se réveille peut-être
un suicide peut-être quelque fantôme répudié derrière la tempêtelà où je tourne la tête je ne vois que cafards pisseurs asthmatiques
derrière un troupeau égaré et je ricane soyez maudits chacals du moment
si des serpents se mettent à ramper avec des débris de conscience ou
pleuvent comme la fatalité sur les crânes ne bougez plus il faut crier
moi je reste à l'aube un mendiant perpétuel je me libère de la tyrannie
des merveilles mes doigts sont guéris des mensonges de
la plume malgré la gelée et la hantise des vents implacables
je suis armé de haches
je tremble
la sueur de mon front fait germer rocs et squelettes
malades à n'en plus finir dans l'attente du sifflement
du soiret nous retournons mille et mille injures aux entrailles
pieds nus dévêtus où retourner la misère escalade la
pénombre sans passeport
comme aux frontières
nous sommes ici pieds et mains liés le brouhaha du temps
comme d'habitude nous parvient de loin je n'entends rien
on dit l'Europe en perdition
l'Amérique
l'Asie
l'Australie
et même l'Afrique
il n'y a qu'un grand tam-tam soyez témoins horizons muets
ô forces condamnées de l'inconnu je ne suis ni singe ni
frénésie de nain fanatique je me jette sur les montagnes
me fabrique une corde le meurtre le sang sans henné
dans tous les yeux la fin des vacarmes est une danse
comme le vide les mouches bleues ne pardonnent pas je
suis un fou étranger avec un poème inachevé où vibre
le plus terrifiant de ma colère
les ventres bombes
la symétrie du vingtième siècle
attention aux chiens lépreux
malheur aux rêves de la tortue
il ne nous importe guère à nous de ronfler ou d'être debout
sans que vous vous asséchiez ruisseaux de ma terre eh
bien je chanterai
à ma mère
à mes frères
ma petite fille
999.000.000.000 de poèmes j'ignore pourquoi ces ruades à
ma tourmente esprit en mal de contemplation tunique
lumineuse à même mon corps comment baisser les yeux
donc